Dans l’article précédent, nous avons parlé de la vie d’études à distance de nos filleules pendant ces vacances d’hiver si spéciales, impactées par l’épidémie. Nous allons continuer à vous présenter leur vie quotidienne à travers des extraits des lettres qu’elles nous (ou vous) envoient.

D’une manière générale, on peut dire que parmi nos filleules, il y a un peu d’inquiétude et de peur de l’épidémie, et aussi un peu de regret de ne pas pouvoir assister aux événements collectifs pendant le nouvel an chinois qui comptent énormément pour le peuple Miao. Elles apprécient cependant beaucoup l’occasion imprévue de passer plus de temps avec leur famille et font preuve de beaucoup d’espoir et d’optimisme.

Tout d’abord, même si Danian et ses alentours ne sont pas directement impactés par l’épidémie grâce à leur isolement géographique relative par rapport aux autres régions, les filleules et leur famille ont quand même ressenti une atmosphère stressante, surtout pendant le nouvel an chinois.

Linying C, une filleule en dernière année du lycée, nous raconte ainsi : « Les villages qui sont d’habitude très joyeux et bruyants pendant la fête sont devenus très calmes. Nous avons annulé les rassemblements et fermé l’entrée au village afin de contrôler l’expansion de l’épidémie. Cette expérience inattendue me rend un peu inquiète : tous les jours je me demande quand l’épidémie va se terminer et je me demande avec un peu d’angoisse comment je pourrai participer au concours de l’entrée à l’université si l’école reste fermée. »

Lili C, une autre filleule de la même année scolaire, s’inquiète également : « Malgré les cours en ligne, l’instabilité d’Internet dans des régions montagneuses rend l’enseignement plus difficile, d’autant plus que nous ne sommes pas aussi disciplinées qu’au lycée, beaucoup d’entre nous ne font pas leurs devoirs en temps voulu, et nous ne comprenons pas certaines matières par manque d’échange en face-à-face avec les enseignants. Tout cela épuise peu à peu la confiance de nos enseignants. J’ai hâte que les cours reprennent. »

Beaucoup regrettent que cette épidémie les ait empêchées d’organiser des activités collectives pendant le nouvel an chinois, une grande tradition à laquelle le peuple Miao demeure très attaché. Certaines de nos filleules nous ont raconté le plaisir que leur ont procuré les différentes activités avant que l’épidémie devienne sévère.

Xiya W nous en donne trois exemples :

打同年Datongnian, une tradition où les gens de deux villages fêtent le nouvel an chinois alternativement dans l’autre village que le leur,

芦笙节 Fête de Lusheng, où l’instrument de musique Lusheng est joué en compétition par équipes de villages,

踩堂 Caitang, une danse collective Miao.

Son activité préférée est Datongnian, car elle a l’occasion d’aller dans le village voisin avec des amis pour inviter les gens à venir dans le sien. Rien de plus joyeux pour un peuple marqué par l’hospitalité !

Avec l’avancée de l’épidémie, nous voyons à travers les lettres des filleules que de plus en plus d’activités ont été annulées, et elles le regrettent, tout en exprimant leur compréhension.

D’un autre côté, beaucoup d’entre elles ont plutôt apprécié cette opportunité de passer plus de temps avec leur famille. Traditionnellement, le nouvel an chinois est l’occasion la plus importante de se retrouver en famille, et c’est d’autant plus vrai pour les familles dont les parents travaillent très loin, séparés de leurs enfants (ou l’inverse).

Lifan W nous a donné la description très vivante de la période du nouvel an chez elle cette année : « Nous avons peur d’être contaminés, alors nous sortons rarement. Dans ma famille, nous avons fait beaucoup d’achats pour préparer et célébrer cette grande fête. Nous cuisinons des plats délicieux et faisons des barbecues à la maison, nous envoyons et recevons mutuellement des enveloppes rouges virtuelles du nouvel an (qui contiennent de l’argent pour matérialiser les souhaits de bonheur) depuis notre portable, nous communiquons avec des amis ou des membres éloignés de nos familles par WeChat. J’aime beaucoup ce style de vie, où toute la famille est réunie pendant plusieurs jours. Nous nous rappelons mutuellement d’épisodes amusants de notre enfance en éclatant de rire, et nous nous racontons des événements qui se sont passés récemment dans la vie de chacun. Ainsi, nous en profitons pour mieux nous connaître. Ces échanges sont à la fois décontractés et intéressants. »

Xiaodie J dit aussi : « En raison de l’épidémie, le nouvel an chinois est moins festif, mais j’ai pourtant ressenti le bonheur de la vie de famille. Depuis l’entrée en dernière année de lycée, je suis peu retournée chez moi, et mes vacances d’été se limitaient à 14 jours seulement. Je sais qu’en tant qu’élève de dernière année, je ne dois pas espérer avoir des vacances plus longues, mais je suis très contente de pouvoir rester à la maison pour accompagner mes parents et les aider dans les tâches ménagères. »

D’une manière inattendue, certaines filleules confirment leur choix d’avenir en tenant compte de cette épidémie. Xiaodie nous dit : « À travers cette épidémie, j’ai senti la générosité et l’abnégation des professionnels de santé publique et l’amour dans ce monde, et j’ai aussi constaté la gentillesse de gens qui ne se connaissent pas mais qui font de leur mieux pour s’entraider, ce qui a confirmé mes choix de vie. Je vais travailler dur pour devenir une personne comme eux et pouvoir aider celles et ceux qui sont dans le besoin. »

Enfin, toutes les filleules nous expriment leur souhait, leur espoir et leur optimisme pour les prochains mois. Lifan écrit à la fin de sa lettre : « Je suis convaincue que nous pourrons gagner ce combat à condition que chacun coopère étroitement avec le gouvernement et fasse attention à sa propre hygiène personnelle. » Beaucoup de filleules partagent sa confiance et son optimisme, comme Linying l’écrit très bien : « L’épidémie va se terminer, et le printemps va arriver. »

Yizhen Yin